Un an déjà qu’ils parcourent le monde à pied ! Ils sont trois français, Thierry Montaner (31 ans, Valence), Sylvain Alleg (32 ans, Créteil), Killian Blais (25 ans, Asnières-sur-Seine) à avoir quitte Valence le 7 mai 2008 pour se lancer dans l’aventure, abandonnant derrière eux le confort de leurs vies citadines. Avec seulement 2 euros par jour en poche, leur progression n’a rien d’un voyage touristique conventionnel. Outre l’aspect purement budgétaire, ils privilégient les relations humaines aux échanges mercantiles. S’ils voyagent à pieds, c’est non seulement pour faciliter les rencontres mais aussi évoluer sur des terrains préserves.
Thierry, part en 2004 pour un tour d’Europe à pieds de 3000 kilomètres qu’il réalise en 6 mois. C’est au cours de cette longue marche riche en expériences intenses qu’il prend conscience de l’importance des les partager avec des compagnons de route. Le projet « tout en marchant » s’ébauche alors. Après trois années à le mûrir il part en recherche de baroudeurs assez téméraires pour l’accompagner sur les chemins pour les cinq prochaines années. Au total 88 candidats se présente, la plupart de doux rêveurs ne donnent pas suite. Une randonnée est organisée en pleine hivers avec des conditions aussi proches que possibles de celles du tour du monde tels qu’ils l’imaginent : les sacs alourdis, les conditions d’hygiène sommaires, le confort aussi. Tout ceci, dans le seul but d’évaluer les résistances et les motivations de chacun des candidats. A l’issu de ce trek l’équipe est constitue, elle est franco-québécoise et comporte huit membres. Cinq mois supplémentaires sont nécessaires pour parfaire le projet, du site web, démarchage de partenaires, différentes recherches sur, l’équipement requis, l’itinéraire, les démarches consulaires, les risques inhérents à chacune des zones traversées etc… Chaque point est consciencieusement examine peut être pour conjurer l’appréhension de devoir tout abandonner de leur vie confortable.
Une association est crée afin, d’une part, de faciliter les démarches administrative, et surtout pour donner un cadre à cette aventure. Chacun perçoit ce voyage à sa manière mais tous s’accorde derrière les valeurs de l’écologie et de l’équité. Ils décident alors d’utiliser leur voyage afin de véhiculer ces valeurs. Le projet apparaît sous sa forme définitive et peut se résumer en trois objectifs majeurs.
Le premier est d’effectuer un tour du globe géographique à pied dans un souci d’innovation et de découverte en essayant de ne pas recourir aux moyens mercantiles pour progresser. Dans la mesure ou le temps imparti par les titres de séjours le permettra, les participants proposeront aux gens rencontrés de les aider dans leurs tâches quotidiennes en échange d’un repas, d’un toit. Les échanges relationnels avec la population et l’imprégnation des cultures locales font aussi partie des ambitions du projet.
Le second qu’ils se sont fixé est de ramener des documents multimédias (photographies, vidéos, textes et sons) destiné à alimenter le site internet dédié à leur voyage. Ils relateront leurs péripéties et illustreront les moments forts de ce voyage, la manière dont ils percevront ce voyage, les rapports qu’ils entretiendront entre eux et avec les gens rencontrés à travers des documents publies régulièrement en ligne.
Le troisième est de réunir des vidéos de ce périple en vue de réaliser, à terme, une série de reportages et de documentaires destines à une diffusion télévisuelle voire cinématographique. Ils seront à la fois acteurs et réalisateurs de ces films axés tout autant sur leur progression et leur quotidien que sur les rencontres qu’ils feront, les découvertes des coutumes et des patrimoines, reconnus ou non, qu’ils pourront expérimenter.
Le départ est donne, une belle journée du mois de Mai. Un petit coup de projecteur sur ces intrépides marcheurs est donne à l’ occasion du départ puis ils s’élancent sur les chemins drômois en direction de leur première frontière: l’Italie. Les premières semaines sont difficiles. L’embonpoint de certains conjugue aux efforts quotidiens éprouvent les corps et les morals. Le contraste entre le soleil mordant de ce printemps particulièrement chaud et la froideur humide des alpes en ce début de saison accentue cette impression de difficulté. Cependant les premières expériences et rencontres sont suffisamment riches et nombreuses pour maintenir la soif de découvertes qui agit sur eux comme un moteur.
Peu à peu les paysages évoluent. Des montagnes aux littoraux et des plaines aux forets les équipes se mélangent et se retrouvent régulièrement pour que chacun d’eux s’accordent et apprennent à voyager ensemble. Leurs esprits imaginatifs et leur débrouillardise leur permettent de mettre en place des astuces pour continuer leur marche avec un budget aussi serre, toujours dans le respect des lois en vigueur. C’est ici que naîtront les «discartis», une méthode consistant à présenter leur projet aux boutiques et leur demander gratuitement des produits expirés. La barrière linguistique limite certes la communication mais souvent les commerçants enthousiastes ou amuses donnent plus que prévu et les premières semaines s’écoulent agréablement, que ce soit sur la cote dentelée du golfe de Gênes ou dans les hautes montagnes de Ligurie. S’amorce alors la traversée de l’interminable plaine du Pô avec ses dédales de canaux infestes de moustiques et sa chaleur étouffante. Un climat de méfiance à l’égard de ces voyageurs se fait peu à peu plus présent et c’est dans cette ambiance peu propice à l’hospitalité que les accueils les plus chaleureux apparaissent alors comme exceptionnels et laissent dans leurs esprits des souvenirs forts. Souvent une fraternité presque indéfinissable joue en leur faveur, provenant généralement d’immigrés africains, de marginaux ou saltimbanques qui contraste assez singulièrement avec le rejet global, bien que non systématique, ressenti lorsque sont sollicitées les structures ecclésiastiques ou administratives.
Puis vient le temps de franchir de nouvelles frontières. La petite Slovénie forestière et vallonnée est traversée en quelques jours qui agissent comme une bouffée d’oxygène après les longues semaines de platitude dans les environs de Padoue et Venise. S’enchaine ensuite la Croatie et son rivage aux eaux limpides gangrène petit à petit par la peste du tourisme de masse. Un accueil chaleureux, souvent associe à des consommations nombreuses de bière et de rakia, l’eau de vie locale qui les accompagnera durant toute leur traversée de l’ex-Yougoslavie. Une ambiance de farniente et de vacance au bord de cette mer presque sans vagues gagne le groupe pendant quelques jours, puis le besoin de s’éloigner des zones touristiques se fait de nouveau sentir. Ils partent alors à l’intérieur des terres, découvrent les vestiges des anciennes enclaves serbes abandonnées par la quasi totalité de ses habitants et rencontrent des gens résolument tournes vers l’avenir. Ils se souviennent notamment d’Ivan, un biologiste s’occupant d’une petite réserve vouée à la protection des ours bruns dans le petit village de Kuterevo, sur la lisière du parc naturel du Velebit.
En approchant de la Bosnie-Herzégovine les stigmates de la guerre se font alors plus présents. Les impacts de balles sur les façades semblent faire partie du décor et les habitants ne semblent plus y prêter attention alors qu’ils frappent les regards des marcheurs. La présence d’innombrables zones minées les contraint aussi à ne pas s’écarter des axes bitumes. Cela ne les empêche cependant pas de faire de belles rencontres, toutes ethnies confondues. A l’image d’Irmela, cette jeune régisseuse du petit théâtre de Konjic, près de Sarajevo, qui malgré des drames personnels lies au conflit récent, s’emploie comme personne à redonner vie à ces lieux.
Par la suite ils se séparent l’espace d’un mois pour emprunter deux itinéraires distincts: un groupe opte pour se diriger vers le sud en privilégiant la marche tandis qu’un autre souhaite se rendre à Sofia, en Bulgarie, sans exclure les moyens motorises de leur progression, rendez-vous étant pris près de Thessalonique, en Grèce.
Le dépaysement sera important, surtout au niveau culturel. Evoluer sur les hauts plateaux karstiques du Monténégro et la progression dans des territoires préserves que seuls les piétons peuvent gagner les comblent en tout points. Puis vient l’Albanie, ou l’accueil de gens qui choient les voyageurs en leur proposant de bon cœur le confort rustique de leur demeures modestes et parfois des mets étranges, tels que des yeux de brebis, achèvent de marquer leurs mémoires. De l’autre cote, les bons souvenirs de Belgrade et de Sofia satisfont aussi la deuxième équipe sur un plan beaucoup plus urbain. La visite du village natal d’Emir Kusturica, Mokra Gora, reste un moment marquant de leur traversée des Balkans.
Vint la Grèce, ou les retrouvailles avec le littoral atténuent la difficulté d’évoluer sous des températures caniculaires. Ils reprennent leur pratique des « Discartis », abandonnée depuis l’Italie, tandis qu’ils bénéficient de la manne extraordinaire des fruits arrivés à maturation en ce mois de septembre et qui abondent dans la région. Des lors qu’ils quittent le bord de mer, il n’est pas rare que leur passage au sein de petits villages suscite des invitations à partager une bière voire un repas. Puis ils atteignent la frontière turque pour rejoindre la grande métropole, Istanbul, à partir de laquelle ils mettront pieds sur le continent asiatique.
La traversée de l’Europe, de part ses facilites administratives, constitue la dernière phase test du projet. C’est lors de celle-ci qu’apparaissent les premières divergences de philosophie quant au mode de voyage. Chacun essaye de faire des concessions pour maintenir la cohésion du groupe mais l’auto-stop apparaît comme le nœud du problème. L’obligation d’emprunter les principaux axes routiers d’ex-Yougoslavie, en raison des nombreuses zones minées, contribue nettement à creuser le fosse entre les différents membres du groupe. L’arrivée à Thessalonique et le départ prévu de Simon, le québécois, portera un coup dur à l’harmonie de l’équipe. Quelques rotations supplémentaires des groupes sont tentées pour trouver une solution mais en vain. Les portes de l’orient, à Istanbul, se ferment alors sur l’ambition du départ d’accomplir ce voyage à huit. C’est désormais à trois qu’ils poursuivent l’aventure exclusivement à pied, en accords avec leurs aspirations.
En Turquie, les toutenmarchistes découvrent un pays contraste, autant par ses paysages que par ses cultures. Les collines cultivées d’après la frontière comme les canyons semi-désertiques de l’Ouest d’Ankara sont peuplées de villageois différents mais unis dans la démarche spontanée de leur offrir l’hospitalité. Le dépaysement est accentue par l’expression d’une foi fervente en l’Islam illustrée par ces chants réguliers provenant des minarets des nombreuses mosquées. Les rapports avec les forces de l’ordre sont fréquents et toujours cordiaux malgré une première approche parfois crispée. Peu à peu les arbres se font plus rares. L’entrée dans la fameuse région de Cappadoce, pourtant très touristique, leur procure des souvenirs exceptionnels. L’hiver s’installe lentement tandis que les hautes chaînes montagneuses de l’Est du pays se profilent à l’horizon.
Ils évoluent dans de profondes gorges rocheuses ou sur des cimes enneigées. Parfois la traversée pieds-nus de cours d’eau changes en torrents alors que les rives demeurent glacées se font inévitables mais leur progression vers la frontière Georgienne se poursuit. Les portes du Caucase s’ouvrent alors devant eux et c’est avec une excitation certaine qu’ils les franchiront dans quelques jours.
Au cours des cinq années à venir ils traverseront près de quarante pays éparpillés sur tous les continents. Toujours à la recherche de découvertes et d’insolite, ils veilleront à alimenter leur site internet de récits et d’images pour faire partager la soif de dépaysement qui est la leur.
youyouk
13 juin 2009 à 18:13
impressionnant. je ne sais pas combien de gens seraient capables de le faire… moi j’en serai incapable.
Bloguer ou ne pas bloguer » Merci de voter !
13 juin 2009 à 20:52
[…] : Tour d’Europe à pied ou 35 000 kms en 5 ans ! Back to London … Soon […]
Laurent Bourrelly
15 juin 2009 à 7:55
Rien que de penser au défi, je suis déjà crevé. En tout cas bravo aux 3 aventuriers dont j’accueillerai volontiers la suite du récit sur Adicie.
Olitax
18 juin 2009 à 20:08
Excellent ! Quel courage 🙂
A propos tiens. L’autre jour à la plage, je vais à la douche et avec mon amie on croise un jeune homme avec son vélo. Il avait l’air bien chargé ! Et même une petite brouette accrochée derrière… Moi pour rire : Ben alors ? Vous faites le tour du monde ? 🙂
Et là : Oui, je suis parti de Bretagne (si ma mémoire est bonne) et je vais en Perse 🙂
Je peux vous dire que j’étais sur le cul :p Je disais ça en rigolant et il me sort qu’il va faire toute cette route en vélo !
Après je suis resté avec lui discuter, il a voulu s’arrêter au bord de mer car c’était pour lui la première fois qu’il voyait la méditerranée.
Il m’a tout raconté, comme il a organisé pourquoi il fait ça etc…
Il m’a donné l’adresse de son blog, ou il donner des nouvelles dès qu’il en a l’occasion : http://dynamiquedimmersion.blogspot.com/
C’est vraiment un type bien sympa que j’ai rencontré ce jour là. Moi qui voulais juste plaisanter pour une fois ca c’est bien terminé 😀
Il faut beaucoup de courage et d’envie pour faire une telle chose. Je ne sais pas.. peut être moi aussi un jour qui sait ! Après les études bien sur… 😉
Nullete
19 juin 2009 à 13:03
Quel courage ont ces gens !
J’en connais un autre (virtuellement et par mail), qui est en route à pied jusque Jérusalem :
http://www.jclmorisset.com/
Kaniass
8 juillet 2009 à 12:05
Heu je suis mirot ou je n’ai pas vu l’adresse de leur site??
Laurent Bourrelly
8 juillet 2009 à 14:02
J’avoue que le lien n’est pas très visible en fin d’article.
Le voici à nouveau : Tout En Marchant
Laura
2 août 2009 à 20:29
Vraiment respect! Forrest Gump n´aurait pas fait mieux 😉
Tour du monde
5 octobre 2009 à 20:12
35 000 km à pieds ! Alors là je dis chapeau. Je déjà vu un paquet de sites de voyageurs mais je dois dire bravo les gars.
Thierry Montaner
17 novembre 2009 à 8:41
Je profite d’une connexion a internet plutôt rapide pour vous remercier de tous ces encouragements, ca fait plaisir 🙂
Actuellement nous sommes en train de régler des problèmes de matériel et avons du revenir a Istanbul (d’où la bonne connexion ) pour faire réparer notre camera. Ça fait déjà plusieurs mois que ca dure, du coup nous avons pris le taureau par les cornes et avons décidé de régler le problème par nous même.
Tout devrait être rentre dans l’ordre dans deux semaines environ. Des lors nous repartirons vers la capitale Géorgienne (en stop cette fois, nous y somme déjà allé a pied ) pour faire les démarches pour le visa Azerbaïdjanais. L’aventure se poursuivra alors.
Voila ! Merci encore et peut-être a bientôt.
Thierry
Arlette
18 novembre 2009 à 15:29
Ca fait plaisir d’avoir de vos nouvelles 🙂 … Même si j’avais pas laissé de message, je suis votre aventure, d’autant que partir un 7 mai je ne peux pas oublier cette date !
Bon courage pour la suite ! Et sait-on jamais, si de votre aventure vous en tirez un livre, vous aurez le lien pour le proposer à mes lecteurs 😉 …
A bientôt le plaisir de lire vos prochaines aventures…
Bloguer ou ne pas bloguer » Sweet Sixteen
21 avril 2011 à 18:51
[…] 151 résultats et link:blogoliviersc.org/ en propose 177 avec des surprises : la première, avec Adicie, montre l’atout des ping back lorsqu’ils n’avaient pas été supprimés par […]
web-creativite
21 mai 2011 à 10:52
Quel prouesse ce tour d’europe a pied, je suis impressionné !
Seo
6 septembre 2011 à 17:22
C’est vraiment pas facile. Il faut vraiment le vouloir, bravo pour le voyage.